Retraites : Baisse des pensions programmée, communication volontairement confuse

Le SNES avec la FSU considèrent que le contrat social que constituent les retraites doit s’organiser autour de véritables règles explicites. Ce sont les choix collectifs de répartition et de financement qui doivent être mis en avant en posant explicitement la question de la répartition de la richesse entre actifs et retraités.

Entre les annonces Macron d’avril et le rapport Delevoye de juillet puis encore Macron fin août, les intentions divergent, apportant encore plus de confusions sur le projet de réforme des retraites. Cette confusion qui règne depuis 2017 sur les intentions précises du gouvernement en matière de retraite est pourtant organisée et partagée au plus haut niveau autour de l’idée d’un plafond des dépenses de retraites.

L’équilibre du système : une entourloupe programmée

Tous les discours et les communications des partisans d’une énième réforme tournent autour d’un équilibre financier à respecter mais il est purement idéologique avec le seul objectif de toucher à l’âge légal de départ peu importe les manières d’y parvenir. Les projections du COR indiquent un léger déficit en 2022 en ce qui concerne le solde (0,4 % du PIB). Ce sont les dépenses qui restent stables (13,8 % du PIB) mais les recettes sont l’objet de prévisions et de calcules artificiels. Un facteur qui influe fortement sur les ressources du système est la part des rémunérations des fonctionnaires dans l’ensemble des rémunérations. Leur taux de cotisations (celui de l’agent et celui de l’État via le CAS Pensions) est très largement supérieur à celui des salariés du privé. Ainsi lorsque la part des rémunérations des fonctionnaires dans l’ensemble des rémunérations diminue ce qui est bien prévu dans la feuille de route du quinquennat, les ressources pour les retraites diminuent…

Le COR n’a aucune difficulté à préciser que le poids des dépenses de retraites dans le PIB ne va pas dériver quand bien même on ne toucherait ni à l’âge de départ légal à la retraite, ni au mode de calcul des pensions. Les réformes des 25 dernières années ont déjà fait beaucoup de dégâts et l’indexation des pensions non plus sur les salaires mais sur l’inflation ou encore leur gel a contribué à creuser l’écart entre les retraités et les actifs.

Au-delà du simple équilibre entre dépenses et recettes, c’est la place du travail dans la société et ses diverses formes de reconnaissance sociale qui sont en jeu. Avec l’augmentation du nombre de retraités dans les années à venir, le vrai sujet de débat est bien celui de la proportion de la richesse produite par les actifs qui doit être prélevée pour financer les pensions. Elle doit donc être augmentée dans le PIB. La figer revient à faire supporter aux seuls retraités de demain les conséquences du vieillissement de la population.

Des mesures avant 2025

Macron et son gouvernement veulent donc faire travailler les salarié(e)s plus longtemps. Le rapport Delevoye de juillet précise que ‘Garantir la pérennité du système universel de retraite suppose qu’il soit à l’équilibre en 2025 au moment de sa mise en place‘ ce qui signifie bien que dans le système actuel, des ajustements rapides pourront être fait chaque année au moment des lois de financement de la Sécurité sociale en modifiant des paramètres comme la création d’âges pivots ou l’augmentation des durées d’assurance. Cela revient à rompre le contrat entre les générations. Pourtant le partage de la richesse produite peut permettre que l’accroissement de l’espérance de vie s’accompagne d’une diminution du temps passé au travail.

Le rapport Delevoye de juillet et l’absence de simulations

À aucun moment depuis 18 mois de concertation, il n’a été possible d’avoir de réponses à deux questions simples au sujet du slogan présidentiel et de son projet de retraites à points où un euro cotisé donnerait les mêmes droits à tous :

  • Quid alors de la continuité du salaire avec un objectif clair de taux de remplacement ?
  • Quel niveau de vie veut-on assurer aux retraités ?

Le rapport remis le 18 juillet ne fournit aucune simulation pour les fonctionnaires. Il indique que l’âge légal de départ serait maintenu à 62 ans mais un âge de taux plein serait créé à 64 ans, avec 5% de décote par année manquante. La valeur d’achat du point serait fixée à 10 euros et celle de service à 0,55 euros annuels pour une liquidation de sa pension à l’âge du taux plein, fixé à 64 ans. Sur l’évolution de la valeur de service du point une fois que le nouveau régime serait en place, deux mécanismes sont cités, créant incertitude et opacité :

• La valeur de service pourra varier en fonction de l’évolution des paramètres économiques et démographiques ;

• L’âge de taux plein pourra être reculé, faisant varier de fait la valeur du point (par exemple, en cas de recul d’un an, les 0,55 euros ne seraient plus obtenus à 64 mais à 65 ans).

Le choix du mode d’indexation des pensions sur l’inflation est aussi un facteur de baisse des pensions, tout au long de la retraite et d’un nouveau décrochage avec les actifs.

Le SNES avait déjà publié en mai dernier sur son site les simulations en utilisant les données des régimes complémentaires Arrco et l’Agirc. Actualisées avec les nouveaux paramètres, elles montrent une dégradation encore plus importante pour la retraite calculée en intégrant la totalité de la carrière. Toutes ces projections montrent que la prise en compte des primes n’est absolument pas une compensation de la perte subie, en particulier dans des corps ayant peu de primes. Pour les professeurs documentalistes, les CPE, les PSY-EN, la perte serait encore plus importante puisque le taux de primes pour ces corps est beaucoup plus bas.
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Il n’y a rien de plus illisible qu’un système dans lequel on ne peut pas connaître à l’avance le montant de sa pension ! Il n’y a rien de plus simple, à l’opposé qu’un système qui assure un pourcentage du dernier traitement brut ou des meilleurs salaires dans le privé. Si on doit réfléchir sur les retraites du public et du privé, il faut alors faire un affichage d’objectifs convergents en termes notamment du taux de remplacement. C’est cela la vraie solidarité public-privé. Cela ne passe pas par l’uniformisation des systèmes. Le SNES affirme que la simplification n’est pas toujours synonyme de justice.

Les droits familiaux

Là encore, le Haut-commissaire à la réforme des retraites considère que l’organisation de la solidarité se fera à enveloppe constante. Les dispositifs de solidarité sont importants et varient suivant les régimes (8 trimestres de durée d’assurance par enfant dans le privé ou un an de bonification pour les enfants nés avant 2004 dans le public puis au plus 6 mois de durée d’assurance pour ceux nés après 2004). Cet exemple montre que chaque système étant différent, il n’y a aucune raison de croire que figer l’enveloppe donnera des résultats comparables. Et si on voulait vraiment ne plus amplifier les inégalités hommes femmes ou créer de nouveaux droits (aidants, prise en compte des années d’étude, possibilités de départs anticipés,…), il faudrait augmenter cette part de solidarité.

La réversion

Actuellement, 4,4 millions de retraités perçoivent une pension de réversion et près de 90% sont des femmes. La réversion corrige une partie des inégalités de pension de droit direct entre hommes et femmes.

Le dispositif annule les conditions de ressources mais maintient l’ouverture des droits aux seules personnes mariées. La pension ne pourra pas être prise avant 62 ans. En cas de divorce, la question des droits à retraite est renvoyée au juge des affaires familiales. Le rapport prévoit le maintien de 70% des revenus du couple. Delevoye se garde bien de faire des simulations. De très nombreuses femmes vont être victimes du projet : la pension de la femme va baisser dès qu’elle gagne plus des 2/3 des revenus du mari. Curieuse façon de lutter contre les inégalités salariales ! Par ailleurs, le rapport ne tient pas du tout compte de la dégradation des revenus du couple du fait de la réforme.

Le futur dispositif se veut unique ce qui pourrait être une bonne chose si l’alignement se faisait par le haut pour tous. Ce qui ne sera pas le cas. Il serait aussi intéressant de savoir quelles économies seront réalisées par ce dispositif… au détriment des femmes.

Le SNES réaffirme avec la FSU son attachement au principe de solidarité intergénérationnelle et au code des pensions, élément constitutif du statut des fonctionnaires. Dans sa publication d’août 2019, la FSU fait valoir ses propositions pour un système de retraites fondé sur l’emploi, les salaires et une autre répartition des richesses.

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La vie militante ne s’arrête pas à la retraite ! Au contraire, les retraités du SNES-FSU participent activement aux mobilisations en cours (protection sociale, dépendance etc) et apportent leurs analyses à des dossiers intergénérationnels.

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