Sécurité sociale, ANI, PSC : pour gagner la bataille d’idées et mobiliser, faire avancer les mandats de la FSU, construisons des alliances.

Rappelons les principes fondateurs de la Sécu: solidarité totale basée sur des contributions proportionnelles aux revenus et accès aux soins garanti en fonction des besoins de chaque individu; principe résumé par la formule : chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.

En revanche les complémentaires santé (mutuelles, assurances, fonds de prévoyance) évoluent dans un univers éclaté et concurrentiel qui segmente les risques avec des cotisations et une couverture qui dépendent à la fois de l’âge des individus et de l’offre de soins qu’ils peuvent se payer.

Par exemple, la MGEN a multiplié les formules d’adhésion selon l’âge, les risques encourus ou supposés, la capacité de financement de l’adhérent-e. Les bas revenus peuvent souscrire des contrats peu chers mais sont moins couverts. Les contrats des retraité-es (1 adhérent sur 2) connaissent une très forte hausse.

Ce système à 2 étages a permis aux gouvernements depuis les années 80 d’organiser le désengagement de la Sécu (déremboursements, forfaits, franchises…) et de transférer des dépenses publiques socialisées vers des dépenses contraintes, en sommant les complémentaires de compenser ou en augmentant le reste à charge des assuré-es. Le tout sans aucun débat citoyen!

Dans le privé

Avec la loi de 2016 découlant de l’ANI (accord national interprofessionnel), une nouvelle étape est franchie.

Elle généralise les complémentaires de santé collectives et obligatoires pour les salarié-es. L’employeur finance 50% de leur adhésion en bénéficiant d’exonérations fiscales et sociales (5 milliards en 2019!). Chômeurs, retraité-es, étudiant-es en sont exclu-es. Les 4 millions de personnes âgées de 20 à 60 ans (les «bons» risques) délaissent les contrats individuels. Par ricochet, le coût de ces derniers s’alourdit… La concurrence entre complémentaires devient féroce, entraînant des frais de gestions considérables (prés de 20% à comparer avec les frais de gestion de la sécu en-dessous de 5%). Les mutuelles se retrouvent en grande difficulté. Les contrats sont assis sur des paniers de soins minimaux, obligeant à souscrire des sur-complémentaires qui renforcent les inégalités.

Dans la Fonction publique

Avec la loi dite de Transformation de la Fonction Publique (TFP) d’août 2019, le gouvernement ne se cache pas de vouloir transposer ce mécanisme à la FP. La situation n’est pas la même selon les versants. La FP territoriale cumule les emplois de catégorie C et pour ces personnels le financement d’une complémentaire est lourd. Les agents de la FP Hospitalière ont accès aux soins dans leurs établissement sans complémentaire.

Lors des négociations avec la fonction publique,les organisations syndicales expriment leurs propositions et les principes qui les guident. Des échanges ont lieu de manière le plus souvent informelle entre elles. La FSU échange avec la CGT et Solidaires, parfois avec FO, un peu avec l’UNSA. La CFDT accompagne le projet gouvernemental sans beaucoup de nuances. Mais il ne se dégage pas de position vraiment unitaire.

La Ministre écoute mais ne s’engage pas sur les réponses.

Le protocole soumis à la signature fin janvier sera dévoilé le 24 décembre 2021 et légèrement remanié le 6 janvier 2022.

Pour l’essentiel, il en résulte un panier de soins sensiblement amélioré par rapport au panier ANI du privé. (C’est en gros la formule équilibre de la MGEN).

Le contrat collectif est obligatoire. C’est l’employeur qui choisira l’opérateur: les agents actifs s’y soumettront. Les cotisations des actifs sont inégalitaires avec une grande prédominance du forfaitaire (et d’une proportionnalité plafonnée),

Aucun mécanisme de prévoyance n’est intégré. Le gouvernement renvoie à l’ouverture de discussion avec les signataires après la présidentielle. Le SNES avec la FSU entend bien agir dans l’intérêt des personnels en les associant au combat mené.

Les agents contractuels sont exclus. Les néo-retraité-es pourront dans un délai d’un an souscrire au contrat collectif, mais à des tarifs allant progressivement de 125% la première année à 175% après 5 ans. Quant aux retraités actuels, ils auront un an après la signature du texte définitif pour souscrire au contrat collectif mais en payant 175% du tarif des actifs!! Les mécanismes de solidarités familiales et entre actifs et retraités sont cosmétiques.

Le financement par l’employeur public est variable en fonction des Ministères (dépendant de la structure hiérarchique, des niveaux de salaires, de la pyramide des âges…)

Et l’équilibre du financement doit être respecté, ce qui signifie que si les dépenses sont en hausse, soit la couverture (le panier) sera diminuée, soit les cotisations augmenteront. Sans parler des dépassements d’honoraires…

Au bout du compte le gouvernement a exercé un chantage honteux: choisir, en cas de non-signature, entre la transposition stricte de l’Accord National Interprofessionnel du secteur privé (dont toutes les études démontrent la nocivité pour l’immense majorité des salarié-es) et, en cas de signature, une formule amendée mais permettant au secteur privé marchand de s’approprier tout ou partie de la protection sociale des agents de la Fonction Publique.

Résumons la transformation progressive à l’œuvre de notre système de santé: s’éloignant du 100% Sécu, il est fragmenté en 3 étages:

  • un régime de base assurant une prise en charge minimum,
  • des complémentaires obligatoires uniquement pour les actifs, ceux qui, considérés comme utiles car produisant directement des richesses;
  • des sur-complémentaires individuelles pour celles et ceux qui pourront se les offrir.

Ce modèle est en rupture avec les mandats de la FSU. Au congrès de Metz, la SFRN a particulièrement souligné la rupture entre actifs et retraités qui doivent s’autofinancer avec un vernis de solidarité solidement encadré par les déplafonnements à venir… Il ne s’agit pas d’une approche corporatiste. La bascule s’opérera pour tous les actifs qui sont autant de retraités en puissance.

Il nous faut d’urgence décrypter, alerter, mener la bataille d’idées et mobiliser car le mouvement syndical a pris du retard.

Rien n’est possible sans l’intervention des assurés sociaux, des militants syndicaux, et des collègues actifs comme retraités. Il s’agit d’un enjeu considérable qui touche les jeunes, les vieux, les autres, les malades, les bien portants, les personnes atteintes de handicap, toutes celles et ceux exposé-es aux accidents de la vie, c’est-à-dire nous tous.

Soucions-nous des alliances avec toutes les forces disponibles pour préserver et élargir notre sécurité sociale pour obtenir la Sécu à 100% que nous revendiquons .

Jean-Bernard Shaki

Ce texte reprend une grande partie de l’ intervention de Claude Rivé de la SFRN lors du stage protection sociale des 17 et 18 mars en Seine et Marne; merci à lui.

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