Séminaire HCFEA-CNSA

Nous prenons acte du séminaire organisé à l’automne sur le retour d’expérience post-Covid afin d’en tirer les conséquences pour des évolutions souhaitables en termes d’organisation des EHPAD, de continuité des services à domicile et de l’appui des aidants.

À ce titre, nous vous faisons part de notre analyse et de nos propositions que nous avons déjà formulées à plusieurs reprises dans le cadre du HCA.

Nous espérons que ce séminaire ne se résumera pas à une opération de communication vis-à-vis de l’opinion publique sans être suivi d’actions concrètes, mais au contraire, qu’il permettra d’élaborer des projets conformes aux attentes et d’attribuer des moyens financiers et sanitaires pour mieux répondre aux enjeux du grand âge et du droit à l’autonomie des citoyens de notre pays.

Nous ne comprenons pas que, concernant le dossier EHPAD, les seules présentations aient concerné deux groupes privés (SOS Seniors, Korian) alors que près des 50 % des EHPAD sont publics.

Les derniers rapports des Petits Frères des Pauvres ont enrichi la compréhension du vécu des personnes âgées, leurs difficultés, leurs souffrances et les inégalités exacerbées par la crise sanitaire. Ils pointent une vision de l’âge de plus en plus négative associée à la perte d’autonomie que tout le monde redoute et des modalités de prise en charge du Grand Âge qui ne permettent pas d’aborder ce dernier quart de la vie avec sérénité. Ces dernières semaines, la situation des personnes âgées a donné lieu à moult débats dont la résultante a été d’opposer sommairement les générations entre elles : jeunes contre vieux, fragiles contre moins fragiles, actifs contre inactifs, utiles contre supposé inutiles et de discriminer la vieillesse. Une des conclusions de ces rapports pointe bien le risque de fracture entre personnes âgées elles-mêmes et où la vieillesse n’est identifiée que comme un naufrage. Nous devons œuvrer à remédier aux fragilités communes à tous, à savoir les nombreuses détresses économiques, sociales, psychologiques. Et dans ces détresses communes, il y a le lien social. Nous en manquons tous cruellement.

Il est temps de bâtir la société de demain en proposant des solutions à ces maux communs également mis en lumière par les nombreux mouvements des personnels dès 2018.

Or, la mise en place d’une branche autonomie gérée par la CNSA et financée à 90 % par la CSG, donc l’impôt, qu’a permis la loi du 6 août 2020, confirmée par la LFSS 2021, ne répond pas aux enjeux à venir.

La perte d’autonomie est indissociable d’une approche globale de la santé et la création d’une nouvelle branche opère une séparation radicale entre la santé et la perte d’autonomie.

C’est exactement le contraire qu’il fallait faire en intégrant le droit autonomie dans la branche maladie de la Sécurité sociale.

Nous avons été étonnés qu’un nouveau rapport ait été demandé à M. Laurent Vachey pour lancer une concertation sur la création d’une branche « autonomie » alors que trois rapports avaient déjà été rédigés dont celui remis par Dominique Libault élaborant 175 propositions pour une politique forte et nouvelle du grand âge en France. Nous rappelons notre opposition aux propositions du rapport Vachey.

Nous pensons que certaines propositions du rapport Libault répondaient déjà à nos revendications, même si nous avons des désaccords pour d’autres, telles que l’utilisation de la CRDS au-delà de 2024 ou du fonds de réserve des retraites, en matière de financement. Nous soutenons la préconisation visant à consacrer une augmentation de 35 % de la part des dépenses publiques consacrées à la perte d’autonomie des personnes âgées dans la richesse nationale entre 2018 et 2030 soit 1,6 % du PIB en 2030 contre 1,2 % actuellement.

Nous estimons que ces nouvelles mesures de financement allaient dans le bon sens, notamment vis-à-vis de la dernière loi ASV du 28 décembre 2015, même si elles restent nettement insuffisantes pour répondre aux besoins à venir, sachant qu’il faudrait au minimum une augmentation d’un point du PIB d’ici 2030.

Le rapport Libault préconise également d’augmenter de 25 % le taux d’encadrement auprès des personnes âgées en EHPAD d’ici 2024 par rapport à 2015. Cela représenterait une augmentation de 13 équivalents temps plein pour 100 résidents, soit 80 000 professionnels supplémentaires.

Même si nous sommes loin des 200 000 emplois nécessaires aujourd’hui dans ce secteur, ces propositions, si elles étaient mises en œuvre rapidement, donneraient un signe encourageant aux personnels qui les réclament depuis plusieurs mois ainsi qu’aux résidents des EHPAD qui voient leurs conditions d’existence se dégrader continuellement. Cependant, il n’est fait aucune référence dans le rapport à l’instauration d’un service public de l’aide à l’autonomie que ce soit à domicile ou en établissement que nous revendiquons et qui permettrait de rendre plus attractifs les métiers, avec du personnel formé, mieux rémunéré et mieux considéré et un statut ou une convention collective nationale de haut niveau.

Enfin, le rapport Libault évoque le financement d’un nouveau risque de protection sociale en précisant que la solidarité nationale, à travers une couverture financière spécifique, pourrait jouer un rôle prépondérant et intégrer ce risque de perte d’autonomie dans le champ des lois de financement de la Sécurité sociale.

Cette proposition entrait dans le sens de notre revendication fondamentale d’intégrer le risque autonomie dans la branche maladie de la Sécurité sociale qui doit être financée par les cotisations avec une prise en charge à 100%. Mais nous rappelons le principe fondateur de la Sécurité sociale, bien commun des travailleurs et gérée démocratiquement.

Nous estimons qu’il doit être instauré un droit à l’autonomie de la naissance à la mort sans barrière d’âge.

Nous refusons de distinguer dans les risques couverts entre ce qui relève du soin, de la perte d’autonomie, et de l’hébergement. Ces derniers sont une conséquence de ce qui a provoqué la perte d’autonomie, maladie ou accident, ils en sont l’indispensable complément : par exemple, le besoin d’un fauteuil roulant est une conséquence de l’affection principale.

Par suite, son mode de financement doit être identique : un financement par cotisations sociales, sans qu’il y ait lieu de distinguer ce qui relève de la perte d’autonomie et ce qui relève de la maladie ou de la maternité par exemple. Nous récusons le financement de la 5ème branche par la CSG voire par l’ajout d’une CSG Autonomie (CSGA préconisée, entre autres propositions) par la CNSA chargée du pilotage de la branche.

De plus, les propositions faites dans le cadre de la création d’une 5ème branche consacrent toute l’attention sur la prise en charge de la perte d’autonomie sans tenir compte de toutes les actions de prévention de la perte d’autonomie faites par les caisses de retraite. Ces mesures de prévention sont essentielles afin de retarder les effets du vieillissement et permettre à chacun de rester le plus longtemps à la retraite en bonne santé et à domicile.

Les politiques de prévention de la perte d’autonomie des caisses de retraite organisées en inter-régimes et en lien avec l’AGIRC-ARCCO sont des points d’appui forts et structurants en territoires.

Toutes les actions menées en prévention de la perte de mémoire, des chutes, de la nutrition par exemple retardent les effets de la perte d’autonomie et retardent également le basculement dans la prise en charge par le soin.

Même si l’importance de l’action sociale des départements n’est pas à négliger au travers du versement de l’APA, il ne faut pas occulter ce qui est fait en matière de prévention par les caisses de sécurité sociale et les groupes de protection sociale.

Pour l’aide et l’accompagnement aux personnes, quel que soit leur âge, que ce soit à domicile ou en établissement plus ou moins spécialisé, selon l’origine ou la nature de la perte d’autonomie, nous préconisons la mise en place d’un vaste service public de l’aide à l’autonomie regroupant et intégrant progressivement une partie de l’existant actuel, avec des personnels à temps plein (pour celles et ceux qui le souhaitent), plus nombreux, mieux formés, plus qualifiés et mieux reconnus socialement.

Ce service public de l’aide à l’autonomie serait chargé d’offrir à toutes les personnes, sur la totalité du territoire national, des services de qualité et dans les mêmes conditions. La présence d’un tel service public de l’aide à l’autonomie éviterait de rencontrer encore des aidants, et surtout des aidantes, épuisés physiquement et psychologiquement.

Ce service public éviterait des conditions de travail et d’emploi différentes entre personnels à domicile ou dans les EHPAD et se ferait donc avec des personnels sous le même statut, sur le modèle de celui des EHPAD publics. L’ensemble des personnels pourrait dépendre de la fonction publique de la Santé.

Comme cela a été stipulé par certains intervenants au dernier HCA du 8 avril 2021, cela permettrait une meilleure articulation entre les différents acteurs et cela valoriserait les différents métiers de l’autonomie, gommant, de ce fait, les difficultés de recrutement rencontrées, notamment au niveau des 100 000 emplois nécessaires au niveau de l’aide à domicile.

Il est indispensable qu’il y ait formation, reconnaissance et rémunération supplémentaire, pour tous les personnels incluant les aides-soignantes et les aides à domicile.

La formation des médecins aux problématiques du grand âge doit être renforcée et il faut remettre la médecine générale au centre de la problématique avec une valorisation pour les médecins généralistes. Cette démarche doit aussi s’inscrire dans une démarche volontariste de formation de spécialistes en gérontologie et gériatrie qui constituent des filières en souffrance aujourd’hui et qui doivent être intégrées dans le tronc commun des formations à venir sous peine de pénurie dans les années à venir.

Devant les difficultés rencontrées pendant la pandémie, notamment au niveau des différents clusters rencontrés, nous estimons qu’il faut repenser les EHPAD de demain sans chambres doubles, mais pouvant répondre à une demande d’installation de couples avec des sanitaires intégrés et l’accès à l’Internet.

Un plan d’investissements est à envisager à cet effet avec la rénovation des EHPAD actuels et la construction d’autres EHPAD publics financés par l’État pour répondre au vieillissement de la population.

Ces futurs EHPAD doivent être de taille humaine, couvrir l’ensemble du territoire afin que la proximité de l’ancien lieu de vie soit assurée pour les résidents, en veillant à leur insertion dans la vie de la cité. Une ouverture sur l’extérieur avec des activités pour les personnes âgées du quartier (animations, rencontres culturelles, gymnastique, formation à l’informatique…). L’installation d’un médecin gériatre attaché à l’établissement et qui pourrait recevoir des personnes âgées de l’extérieur, le logement de proximité d’étudiants infirmiers. L’importance est de créer les conditions qui permettent à chacun, citoyen à part entière, de vivre dans la dignité.

Pour conclure cette contribution, nous réitérons notre demande d’une nouvelle loi concernant le grand âge et de l’autonomie, pourtant annoncée comme un marqueur social du quinquennat.

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La vie militante ne s’arrête pas à la retraite ! Au contraire, les retraités du SNES-FSU participent activement aux mobilisations en cours (protection sociale, dépendance etc) et apportent leurs analyses à des dossiers intergénérationnels.

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