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Éditorial

Tempête.

Photo Marylène CAHOUET
Photo Marylène CAHOUET

« Sachez Monsieur le Président que nous ne nous laisserons plus voler notre vie ». Ainsi s’exprime Annie Ernaux [[écrivaine française dont l’œuvre est surtout d’inspiration autobiographique. La phrase est extraite d’une interpellation au président de la République sur sa conduite de la crise sanitaire et ses responsabilités, reprenant ainsi la chanson de Boris Vian]] en cette période de pandémie sans précédent, alors que le bilan humain s’alourdit de jour en jour.

Certes, personne ne pouvait prédire l’ampleur de la crise – encore que… – mais une chose est sûre : les politiques d’austérité pour diminuer drastiquement les dépenses de santé, les attaques contre l’hôpital public, les personnels, le secteur de la perte d’autonomie (en EHPAD et à domicile) ont des conséquences tragiques aujourd’hui. La course effrénée au profit a vu, par exemple, fermer ou délocaliser des usines qui fabriquaient des matériels indispensables (masques, respirateurs, tests…). Les industries pharmaceutiques ont privilégié la rentabilité financière au détriment du bien général, avec pour résultat la pénurie de médicaments indispensables. Le gouvernement a tardé à prendre les mesures qu’il fallait, arguant d’explications fallacieuses qui avaient bien du mal à masquer cette pénurie.

Face à cela, il y a les personnels, qui luttent, mal protégés, épuisés, contre le fléau, à l’hôpital, en EHPAD, dans la médecine de ville… En première ligne dans les services publics, comme dans la santé et l’éducation, mais aussi dans le commerce, une majorité de femmes font un travail admirable et, comme souvent, invisible. Dans le jour d’après, il faudra bien admettre cette réalité à tous les étages de la société, un peu comme en 1918 quand, au retour du front, les hommes ont réalisé que rien ne serait tout à fait comme avant.

Certes, on le sait, les personnes âgées vont payer un lourd tribut. Mais retraité-e-s et personnes âgées ne veulent pas être considéré-e-s uniquement comme des victimes ou des rescapés chanceux. Le discours officiel à leur égard n’a pas changé. Ainsi comment comprendre l’hypothèse d’une fin de confinement plus tardive pour les plus de 65 ans : compassion ou réaffirmation de leur inutilité pour le système productif ?

Les retraité-e-s tiennent leur place dans les luttes. Avec les syndicats et collectifs d’actifs, dans le cadre du « groupe des 9 », les retraité.es du SNES et de la FSU, en particulier ces derniers mois, ont soutenu les combats des personnels de l’hôpital public, ont manifesté contre la destruction délibérée du service public, contre la privatisation et la marchandisation de la santé, contre les inégalités croissantes dans l’accès aux soins.

Ils ont accompagné les mouvements des personnels des EPHAD qui sonnaient l’alerte contre l’inacceptable. Ils ont fait des propositions pour un financement public, sans reste à charge, de l’aide à domicile et de l’accès aux EPHAD, avec un personnel formé et mieux rémunéré. Mais la loi « grand âge » tant de fois promise a été sans cesse reportée.

Aujourd’hui, non seulement ils s’engagent au quotidien mais ils veulent participer à la construction d’une autre politique en matière de santé, de protection sociale et de pouvoir d’achat. Les retraité-e-s sont acteurs du mouvement social et à ce titre ils veulent être reconnus comme interlocuteurs responsables, et avoir des interlocuteurs eux-aussi responsables dans l’appareil d’État.

Certes, Monsieur Macron a affirmé que la santé devait être en dehors des lois du marché. Mais faut-il le croire alors que l’État débloque 2 milliards pour les hôpitaux et dix pour des aides directes aux entreprises ? Faut-il le croire quand une note de la Caisse des Dépôts, qui travaille à un plan pour l’hôpital public à sa demande, vise à accélérer la marchandisation de la santé et sa privatisation rampante (publication Me
diapart, 1er avril 2020) ? Ne soyons pas dupes : le capitalisme a toujours su utiliser les catastrophes pour étendre son empire. Par ailleurs on ne peut pas non plus balayer le risque d’un repli xénophobe.

Mais rien n’est joué, le discours néo-libéral est largement disqualifié, il s’agit ensemble, actifs et retraité-e-s, de promouvoir les valeurs démocratiques et de construire un monde plus juste, plus solidaire, plus humain en rupture avec les politiques mortifères actuellement menées. Nous serons présent.es à l’appel lancé par la tribune des 18 « Plus jamais ça ! » :

« Lorsque la pandémie le permettra, nous nous donnons rendez-vous pour réinvestir les lieux publics et construire notre « jour d’après »

Marylène Cahouet

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La vie militante ne s’arrête pas à la retraite ! Au contraire, les retraités du SNES-FSU participent activement aux mobilisations en cours (protection sociale, dépendance etc) et apportent leurs analyses à des dossiers intergénérationnels.

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