Loi sur ordonnances

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La loi ‘Ma Santé 2022’ cumule les éléments de casse du service de santé, loin d’améliorer l’accès de tous aux soins. Sans véritables moyens supplémentaires, elle ne répond pas aux besoins.

Un projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé est en cours d’examen à l’Assemblée Nationale. Il découle du plan santé pompeusement présenté par Macron le 18 septembre depuis son palais. Pratique gaullienne qu’il affectionne, totem exhibé sur le portrait officiel (« Mémoires de guerre ») et Croix de Lorraine arborée sur les armoiries.

En même temps qu’on le découvre en chemise, pérorant des heures dans le pays en appelant à un Grand Débat, on découvre un projet de loi dont 7 articles créent des habilitations à ordonnances.

Le constat global du système de santé fut posé d’emblée lors de la prestation présidentielle de septembre : les moyens ne manquent pas, le remède c’est une meilleure gouvernance et organisation. Hôpitaux publics, EHPAD, établissements, médecine de proximité se contenteront de la portion congrue.

Deux orientations majeures pour traiter les difficultés d’accès aux soins

Les 2 premiers titres du projet sont censés traiter de la difficulté très perceptible et aggravée de l’accès aux soins – les « déserts médicaux ». A cette fin on réforme dans sa globalité le recrutement, la formation et la structuration des professions de santé. On met fin dès 2020 à la décriée PACES (Première année commune aux études de santé) qui se traduit par une sélection coriace et des échecs massifs et on met fin au numerus clausus. Une augmentation des praticiens de 20% est attendue à terme. Mais le flou persiste quant à l’articulation des nombreuses années d’études et la spécialisation. Une contradiction : alors qu’on invoque la spécialisation des professions pour justifier la gradation des hôpitaux à venir (proximité, spécialisé, ultraspécialisé), la formation polyvalente commune va durer 6 ans. Les capacités d’accueil des étudiants seront régionalisées, par les Universités avec avis des ARS (Agences régionales de santé) qui élaborent actuellement les zonages des professions médicales en établissant des zones « en tension », « sous-denses », « d’intervention prioritaire », « d’accompagnement », « atones », merveilles technocratiques pour masquer la pénurie…

La médecine ambulatoire / de ville, massivement libérale, souffre principalement d’une très mauvaise répartition géographique des effectifs. Il est clair que l’exécutif élude un affrontement avec les puissants lobbys libéraux, en facilitant même la « porosité » public/privé à travers, par exemple, l’accès des futurs hôpitaux dits « de proximité » aux médecins libéraux. De même les futurs praticiens hospitaliers au statut revu pourront exercer de façon mixte dans les hôpitaux publics et les établissements privés.

L’autre dispositif phare censé faciliter l’accès aux soins est la mise en place de Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Elles prétendent mettre fin à l’exercice isolé de la médecine d’ici 2022, en s’appuyant sur les aspirations très majoritaires des jeunes formés qui débutent. Ce dispositif est regardé avec circonspection par les professionnels qui lui trouvent un caractère très intrusif par rapport aux traditions d’exercice libéral. Les CPTS sont un moyen de gouvernance territoriale de proximité « incubateur » d’innovation. Elles regroupent les professionnels de ville, les établissements de santé publics et privés, les établissements médico-sociaux eux aussi publics comme privés. Elles sont libres de leurs moyens organisationnels à mettre en œuvre, reposent sur l’adhésion, le volontariat. Elles ont 5 missions socles sous réserve de contractualisation avec les ARS à travers un projet territorial de santé. Il s’agit d’améliorer l’accès aux soins ; de participer à la continuité et permanence des soins ; de finaliser les parcours pour les maladies chroniques et la fin de vie ; de simplifier la mise en œuvre administrative ; de définir et poursuivre les objectifs de santé publique, une sorte « d’engagement collectif avec une responsabilité populationnelle ».

Les modalités seront différentes selon les territoires, mais elles ont vocation à couvrir l’ensemble du pays et font l’objet d’un chantier prioritaire au sein des ARS.

De beaux objectifs certes, mais quelle réalité ?

Autres mesures

Des dispositions nouvelles constituent des palliatifs à la crise de l’accès aux soins : les 400 médecins salariés en renfort ; les 4 000 assistants médicaux ; les stages de terrain obligatoires pour les étudiants ; le rôle accru des pharmaciens (vaccination, délivrance de certains médicaments…) ; la télémédecine.

Les techniques numériques sont appelées à transformer profondément le système de santé et ses pratiques. La mise en réseau des données concernant les patients issus de l’Assurance maladie, établissements, laboratoires s’accompagnera de la dématérialisation des prescriptions avec la fin des ordonnances papier. C’est un ensemble qualifié d’‘espace numérique de santé’ qui se mettra en place d’ici 2022 en incluant le dossier médical personnel (DMP), certaines régions le proposant dès cette année.

Globalement, on le perçoit, une démarche à la hussarde, sans grande précision et aux moyens très limités. De plus, elle fait fi des exigences démocratiques exprimées vigoureusement actuellement et ne construit pas une politique de santé au service de toutes et tous dans tous les territoires.

Georges Bouchart

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